Pompiers : 99 appels sur 100 sont « bidon »

12 juillet 2007 - 02h49 - Maroc - Ecrit par : L.A

Une urgence ! Le réflexe, c’est le 15 ! Eh bien, semble-t-il, plus maintenant ! La ligne 15 devient une ligne mise à disposition pour les plaisantins en tout genre. La ligne de secours devient la ligne « blague » du Maroc.

Le capitaine Hassan Mrabet, commandant préfectoral de la Protection civile d’Anfa, a travaillé comme responsable du centre de traitement d’alertes, CTA, de Poggi de 1998 à 2004. D’après les statistiques de la caserne, 12.000 appels sont traités par jour. Les chiffres de 2006 parlent de 40.000 interventions dans le Grand Casablanca. Ramenés à la journée, cela fait 120 sorties quotidiennes. Soit 120 appels de secours véridiques.

Un sur cent !

Une heure dans la salle du centre de traitement d’alertes fait prendre conscience de l’ampleur du phénomène. Au bout du fil, cris d’animaux, mauvaises pistes, rires, musique, propositions indécentes, tout y passe...

Au centre de secours de Poggi, tout le personnel notamment le lieutenant Mohammed Ouadghiri Hassani affirme que le chiffre est encore plus choquant : « Près d’un appel sur 200, tests à l’appui ! » lance-t-il. « Le phénomène a augmenté avec l’utilisation du portable. Le 15 étant gratuit, les appels sont toujours plus nombreux par jour », explique-t-il. Il est vrai que toutes les 3 secondes, le centre enregistre un appel, et ce, sur chacun des 3 postes d’alerte. Verdict ? Un appel « sérieux » méritant intervention en 45 minutes. Et le comble, l’appel provient de la Police, auteur de la majorité des vrais appels de secours.

Avec l’expérience, les agents ont appris à identifier, dès les premières minutes, les appels bidon. Les astuces ne manquent pas. Il faut savoir que même si les plaisantins cachent leur numéro, il s’affiche obligatoirement sur les téléphones du CTA. Quand le blagueur donne un faux numéro, la technique du caporal Aziz Essounaini, c’est de faire le naïf en répétant le vrai numéro pour confirmation. L’interlocuteur prend peur, babultie un rapide « désolé » et raccroche.

Le corps de la Protection civile est unanime, l’inscription de tels actes d’incivisme doit etre réprimé par code pénal. Le délit sera, certes, difficile à démontrer, car la majorité des plaisantins sont des mineurs, mais « il faut faire des exemples », exhorte Aziz Essounaini. « Nos lignes sont numérisées et tout est enregistré. Une coopération avec la PJ (police judiciaire) pourrait être bénéfique », ajoute le caporal.

Le 15 est un numéro gratuit, alors que faire ? La Protection civile a proposé des mesures telles que rendre l’appel payant depuis les portables. Cependant, c’est limiter les secours aux victimes, qui ne disposent plus de crédits sur leur mobile. Cela contraste avec la mission de la Protection civile.

La solution reste la sensibilisation. Le lieutenant Ouadghiri est favorable à la diffusion de spots publicitaires. Il en a déjà le scénario. Un plaisantin dans la rue avec ses amis, appelant d’une cabine le 15 et décrivant un feu. Au même moment, dans la maison du farceur, un incendie qui se déclare. Son frère et sa mère bloqués par les flammes, appelant désespérémment le 15... occupé ! Des images « chocs » pour un message efficient .

« Les lignes sont toujours occupées, les pompiers toujours en retard, voilà ce que les gens disent », s’indigne le lieutenant. De dénoncer « l’incivisme généralisé de la population ». Dans tous les cas, si les agents du CTA ont un doute, ils « décalent » toujours des moyens sur place. Des véhicules disponibles, en moins, lorsqu’il s’agit de plaisanteries. Etablir une culture de prévention reste encore le seul moyen de changer cet état de fait. C’est ce à quoi s’attèle la Protection civile en allant dans les écoles le plus possible.

Fonctionnement de la cellule

Le centre de traitement d’alerte se trouve au centre de secours de Poggi, qui abrite également le commandement régional du Grand Casablanca. En tout, 8 agents et un responsable se chargent par roulement de traiter les appels et de déléguer les urgences au centre de secours le plus proche. Pas plus de 15 minutes pour être sur le site d’intervention. Deux lignes directes existent : une reliant tous les centres de secours et l’autre réservée aux autorités locales (préfecture, police). Au total, près de 200 lignes groupées et 2 radios sont disponibles. La cellule a aussi une mission de renseignements. Elle livre toutes informations relatives aux permanences des pharmacies ou des médecins de garde. Le centre de traitement d’alertes incarne le poste le plus sensible. Sans lui, il n’y aurait pas d’intervention.

L’Economiste - Diane Daudin Clavaud

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