BD : Fatal passage par la case Maroc

30 avril 2007 - 14h10 - Culture - Ecrit par : L.A

Pour sa première bande dessinée « Maroc Fatal », Jean-François Chanson n’y est pas allé de main morte. Il aborde en quatre nouvelles les thèmes dérangeants qui traversent la société marocaine.

Ce français résidant au Maroc, n’hésite pas à parler du hrig, des problèmes de prostitution, d’alcoolisme, des nouveaux rapports hommes-femmes, des tensions arabo-amazighes, et de la corruption policière. « Maroc Fatal », titre-choc, constitue un clin d’œil au maître de la bande dessinée française, Moebius qui, dans un tout autre genre, avait livré son « Major Fatal ».

Acide dans ses propos, Jean-François Chanson entraîne son lecteur dans quatre histoires marocaines qui ont pour point commun la rencontre avec la mort. Toutes les morts évoquées sont différentes mais toutes sont violentes.

Chaque fois, le « fatalisme marocain » comme l’écrit l’auteur, est palpable. Les drames vécus par un petit instituteur, un jeune chômeur diplômé, ou encore un épicier, surgissent, en effet du quotidien, tels des signes du destin.

Les planches sont en noir et blanc, un peu comme les récits.
Jean-François Chanson a pris le parti d’être manichéen. Cette manière de dépeindre des situations stéréotypées donne de la force identificatrice aux personnages et donc de l’intensité subversive au récit.

Parfois, la barrière de la caricature est franchie au détriment de l’efficacité de l’histoire, comme pour ce jeune franco-marocain qui conduit sa voiture illégalement, et raconte en moins d’une page à son cousin marocain qu’il trafique et recèle des objets volés, de la drogue, organise des tournantes et dresse un pitbull dans sa cité en France…
Les nouvelles se déroulent aux quatre coins du Maroc : à Casablanca, dans le Siroua, à Tanger et la dernière à Marrakech.

Celle-ci, « Destins Symétriques », est d’une grande originalité car elle fait se rencontrer les destins similaires d’un occidental et d’un marrakchi. Leur rencontre simultanée avec la mort surviendra d’une manièr éffroyablement banale. En arabe et en français, le récit est organisé en miroir, jouant sur les sens convergents de lecture des deux langues. Pour finir, il faut noter que l’auteur a réussi un tour de force en parvenant à faire paraître au Maroc sa bande dessinée, qui plus est, aussi subversive sur le pays.

En effet, parent pauvre de l’édition marocaine, la bande dessinée est encore trop souvent considérée comme l’apanage de la seule librairie enfantine.« Maroc Fatal » détonne donc d’autant plus dans le paysage éditorial marocain. Subversif, inattendu, parfois décevant, ce premier album n’a pas fini de faire parler de lui.

Libération - Léo Purguette

Bladi.net Google News Suivez bladi.net sur Google News

Bladi.net sur WhatsApp Suivez bladi.net sur WhatsApp

Sujets associés : Immigration clandestine - Amazigh - Livres - Corruption

Ces articles devraient vous intéresser :

Maroc : appel à déclarer férié le jour du Nouvel an amazigh

Quelque 45 ONG marocaines et de la diaspora demandent au roi Mohammed VI de déclarer férié le « Yennayer » ou Nouvel an amazigh, célébré le 13 janvier de chaque année.

Maroc : la liste des députés poursuivis pour corruption s’allonge

Trois députés marocains viennent d’être déférés devant la justice pour corruption. Déjà une vingtaine de parlementaires sont poursuivis en justice pour des faits de corruption et dilapidation des deniers publics.

Le Groupe Barid Al-Maghrib promeut la langue amazighe

Le Groupe Barid Al-Maghrib entend intégrer la langue amazighe dans ses services. Dans ce sens, il a signé une convention de partenariat avec l’Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM).

Maroc : moins de français dans les administrations

Les Marocains souffrent de la prédominance de la langue française dans les transactions informatiques des administrations marocaines. Tel est le constat fait par le groupe parlementaire du Rassemblement national des Indépendants (RNI), qui appelle la...

Nicole Kidman dans l’adaptation du livre « Chanson douce » de Leïla Slimani

Un thriller basé sur le roman de l’écrivaine franco-marocaine Leïla Slimani, intitulé La nounou parfaite (chanson douce, titre original) devrait être produit par l’actrice et réalisatrice australo-américaine Nicole Kidman. HBO développera La nounou...

Des Marocains à la rue : la détresse d’une famille en Espagne

Un couple marocain et ses trois filles mineures âgées de 12, 8 et 5 ans sont arrivés clandestinement à Pampelune en provenance du Maroc il y a un mois, cachés dans une remorque chargée de légumes. Sans ressources ni aide, ils sont à la rue depuis...

Des soldats marocains accusés d’avoir tiré à balles réelles sur des migrants

L’Espagne a ouvert une enquête concernant des allégations de tirs sur des migrants tentant de rejoindre les îles Canaries depuis le Maroc. Une association caritative affirme que des soldats marocains auraient ouvert le feu sur ces migrants,...

Maroc : des biens et des comptes bancaires de parlementaires saisis

Au Maroc, les parquets des tribunaux de première instance ont commencé à transmettre aux nouvelles chambres chargées des crimes de blanchiment d’argent les dossiers des présidents de commune et des parlementaires condamnés pour dilapidation et...

Les Marocains parmi les plus expulsés d’Europe

Quelque 431 000 migrants, dont 31 000 Marocains, ont été expulsés du territoire de l’Union européenne (UE) en 2022, selon un récent rapport d’Eurostat intitulé « Migration et asile en Europe 2023 ».

Les Marocains libres de choisir le prénom de leurs enfants, sous certaines conditions

Les officiers marocains de l’état civil sont à présent dans l’obligation d’accepter temporairement les prénoms déclarés, y compris ceux en contradiction avec la loi, contrairement aux pratiques antérieures, selon un décret qui vient d’être publié.